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Soirée cinéma : L’homme qui tua Liberty Valance – John Ford, 1962

Le 10 mars dernier, nos rencontres autour du cinéma étaient consacrées à « L’homme qui tua Liberty Valance », de John Ford, qui évoque une époque de construction des États-Unis où la loi du colt était remplacée par la loi du code. 
Avec ce film de la fin de sa carrière, John Ford construit un long flash-back à la redécouverte par le personnage de la diligence qui l’a vu arriver dans la ville, diligence qui n’est autre que celle que John Ford a utilisé pour son premier grand western, « La chevauchée fantastique ». 


En revenant sur son cinéma, John Ford revient aussi sur la culture de l’imagerie du western, qui a constitué les bases de la représentation de la mythologie de la conquête de l’Ouest et de l’histoire américaine.

Le coup de génie de ce film est d’introduire un micro-récit dans le flash-back : au moment où Stoddard (James Stewart) va être élu représentant pour la Convention, il s’y refuse, sali par le soupçon de meurtre de Liberty Valance (Lee Marvin). C’est alors que Tom Doniphon (John Wayne), qui a accepté de sacrifier sa vie, conscient que l’évolution civilisatrice passe avant ses propres intérêts, lui apprend que c’est lui qui a tiré pour tuer Liberty. Il libère ainsi Stoddard de sa culpabilité et lui permet de se présenter et de remporter l’élection.

Mais ce qui est passionnant, c’est qu’alors que Ranson Stoddard, revenu au temps présent, veut rétablir la vérité, les journalistes auxquels il se confie lui répondent : «On est dans l’Ouest, ici. Quand la légende dépasse la réalité, alors on publie la légende».

Ford est en train de nous dire, finalement, que la mythologie hollywoodienne constitutive de la culture américaine n’est pas si fiable que ça et dépend du point de vue qui l’a construite.  Introduisant le trouble dans cette iconograpie, Ford annonce l’Amérique de la fin des années 60, celle du doute et de la remise en question, et donne au cinéma ce qui a été baptisé le « Nouvel Hollywood ».